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Faded Memories
6 décembre 2006

Stoned.

instone

Chut, serre les dents, ma belle. Fais comme si tu n'avais rien entendu, et continue de sourire. Oui, c'est bien, ris, même. C'est bien. (Tu n'as rien entendu).
Tu es magnifique, quand tu joues à l'adulte accomplie. Tu le vois dans leurs yeux, plongés dans les tiens, finement maquillés.
Devant la glace, ce matin. Etaler avec application le fond de teint léger, en mouvements circulaires, pour ne pas laisser de traces. Etoffer tes longs cils noirs de mascara, avec lenteur et minutie, jusqu'à ce qu'ils soient tous parfaitement séparés et recourbés. Appliquer en touches légères l'ombre irisée, du bout du doigt, sur tes paupières mobiles, et puis sous l'oeil, à la racine des cils. Peindre tes lèvres pleines de la couleur d'une framboise bien mûre, un beau jour d'été. Passer les doigts dans tes cheveux d'un air négligé, rajoutant un peu de volume aux boucles indisciplinées. Et puis, sourire au miroir, comme pour le narguer, comme pour te jauger. C'est toi. La petite fille dans ce corps de grande demoiselle. (Mais tu n'es plus une petite fille, ne l'oublie pas).
Et puis, sortir, flâner les rues d'un pas alangui, ton petit nez humant les effluves glacées du vent de décembre. Tu fais semblant de ne pas sentir l'ailleurs dans l'air épuré par le froid. Tu es grande, tu es terre à terre, tu es raisonnable. Il n'y a a pas d'ailleurs autre qu'ici, à ce moment présent. Tu ne dois pas l'oublier.
Sourire aux gens dans la rue, et faire semblant de ne pas voir le regard insistant de ce garçon, parce que de toute façon, il ne te donne pas envie de te consumer toute entière dans ses bras, pour peu qu'il ait le courage de faire demi-tour et de t'aborder. Mais vraiment pas du tout. C'est ce que tu te dis, pour ne pas te retourner.
Regarder d'un air qui se veut interessé les devantures des magasins, ton sac reposant tranquillement sur ton épaule, et sourire encore lorsqu'on te bouscule, te faisant sortir de ta rêverie. Tu n'as pas le regard vide, pas du tout. Tu es pleine de vie.
Prendre le chemin du retour, tranquillement, et faire comme si tu n'avais pas remarqué l'enseigne lumineuse du tabac vers lequel tu sembles soudain glisser, tirée par un fil invisible. Te dire que non, tu ne pousses pas la porte vitrée qui tintinnabule, et que non, tu ne fais pas le geste déjà réitéré mille fois d'acheter un paquet de cigarettes, puisque tu as dit à Maman que tu avais arrêté de fumer. Et que de toute façon, fumer tue.
Saluer poliment les voisins, échanger des banalités avec le sourire, toujours, et pénétrer dans l'appartement vide en silence. Sans sourire. Mettre la bouilloire à chauffer, sortir une tasse, le sachet de thé. T'asseoir face à la fenêtre, et regarder sans même le trouver beau le jour qui s'éteint, calmement. Tes doigts ne tremblent pas lorsqu'ils glissent une tige de tabac entre tes lèvres, et actionnent le briquet qui la fera vivre et périr plus vite encore que l'éphémère nocturne qui tape à la fenêtre, en quête de lumière. Boire à petites gorgées le breuvage trop infusé qui te brûle la langue, dont l'amertume est vaine à faire passer celle de la cigarette, imprégnée à jamais sur ton palais.
Ne pas réfléchir, pour ne pas avoir à te répéter encore et encore que tu te détestes, que tu méprises ce que tu as fait de toi, et que c'est de ta faute. Que tu t'es trahie quelque part, tu ne sais plus très bien où, ni quand, tout est trop flou dans ta tête. Ne surtout pas t'avouer que tu t'es brisée en cours de route, et que tu marches sur les débris de tes hiers à chaque pas que tu fais. Ignorer la douleur de tes pieds qui pissent le sang, avançant avec une feinte sérénité vers le jour où tu te casseras la gueule, la tête la première, dans la triste réalité de tes actes manqués.
Attendre. C'est tout ce que tu te permets, dorénavant.
Et, en attendant, tu sais très bien faire semblant. Tu sais très bien te taire lorsqu'il le faut, et sourire quand il le faut, et être sourde quand il le faut. Tu sais très bien être celle que tu dois être. Celle que les gens aiment, tout naturellement. C'est un automatisme.
Alors, quand elle rentre, et que sa bouche profère, sans le faire exprès, tirées de l'ignorance, des paroles qui blessent, tu fais comme si tu n'avais rien entendu. Encore une fois. Et, quand elle referme la porte, même si ton sourire se fâne, c'est normal, c'est parce que tu ne vas quand même pas sourire dans le vide. T'as même pas envie de pleurer. D'ailleurs, t'en es tellement persuadée que tu te demandes d'où peut bien venir la goutte d'eau qui vient de s'aplatir sur tes mains, sagement posées sur tes genoux. Qui se tordent mutuellement les doigts. C'est la fatigue, tu te dis. C'est dur d'être grande.
Mais, allez, redresse la tête, et respire. T'es magnifique. Elle te l'a dit, et tu la crois. Ca vaut bien un sourire.

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Commentaires
M
Eliane,<br /> Je voudrais t'engueuler, tu sais. Mais je me sens trop mal placée pour le faire, et puis. Tu dois bien assez te fustiger toi-même. Juste... Fais attention.<br /> (Et sinon, t'as raison. C'est rien que des mots. Des mots qui blessent, des mots qui trahissent, des mots qui abandonnent. Et j'ai fait une crise d'angoisse hier. J'aurais voulu mourir.)<br /> Je ne sais plus bien. Si je préfère espérer ou faire semblant d'être blasée. Tout ça (la vie), c'est vraiment trop, par moments.<br /> Baisers lactés, parce que le chocolat au lait, y'a que ça de vrai. :-x
E
Juste des pensées, encore et toujours.<br /> Le mail on s'en fout. J'en écrirais des milliers sans réponses, si ça pouvait ramener un peu de joie et d'espoir au creux de ton coeur, au coin de tes yeux.<br /> Le reste on s'en fout.<br /> C'est rien que des mots.<br /> (*soupir* je ne sens même plus le froid. et tu ne le dis pas hein. mais je ne prends plus vraiment soin de moi en ce moment. ça part en poussière tout ça. les bonnes résolutions. les efforts.<br /> ça reviendra peut-être, peut-être pas. on verra.)<br /> baisers chocolats. ^^
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